Publié par : Philippe Plantier | 27 Mai 2010

Depuis 1950, le consommateur en-quête de satisfaction


D’hier à aujourd’hui : les 4 temps de la satisfaction

Philippe PLANTIER, Chercheur Conseil en stratégie Client

Responsable de LE LABO,       02 54 78 44 44

Ce premier article est le premier d’une série à paraître sur ce blog et décrivant les travaux de recherche conceptuelles, méthodologiques, ou techniques,  liés aux clients et aux actions à mener dans l’entreprise par les différentes directions stratégiques, fonctionnelles ou opérationnelles.

Dans le cadre des nombreux articles existant sur la satisfaction  et principalement à la suite de l’excellent article de Philippe MULARSKI sur la fiabilité de nos indicateurs, cet article se veut un éclairage sur l’origine de ce désordre apparent et tente d’apporter les bases d’un modèle d’étude permettant l’élaboration d’ indicateurs client adaptés à la Balanced ScoreCard.

  1. Le passé éclaire le présent

La prise en compte du client ne date pas d’hier, cela remonte à la nuit des temps – Jacques SEGUELA disait d’ailleurs que le marketing avait été inventé par Jésus Christ – mais le 20° siècle est un siècle parmi les plus perturbés de toute notre histoire en raison de la rapidité des révolutions sociologiques vécues.

La première moitié du XX° siècle a vu naître des innovations majeures dont le développement s’est réalisé extrêmement rapidement en raison, principalement, des besoins de guerre (automobiles, avions, téléphone etc).

En ce temps là… les études de satisfaction des clients n’avaient pas lieu d’être en raison d’une proximité forte entre les marques, les unités de production et leurs clients. Le contact était direct, les garanties morales et les défaillances des produits à fort contenu innovant représentaient une contrainte parfois acceptée, contrepartie de l’accession au progrès.

Les marques n’étaient d’ailleurs pas avares en marketing. Tous les secteurs innovaient allant de la parfumerie à l’automobile. Les réclames et les médias utilisés (de la Tour Effel à la caravane du Tour de France) mettant en évidence le bénéfice produit de manière créative.

L’innovation est une valeur fondamentale de cette époque et la gestion de la dissonance cognitive résultante a souvent été bien appréhendée.

(CITROEN dès la fin des années 50 a su gérer ce principe avec brio avec sa DS. La DS est en fait un véhicule laboratoire doté de 20 années d’avance sur toute la production mais à la fiabilité approximative en raison d’une mise au point trop rapide associée à trop d’innovations et à un réseau pas assez compétent en représente l’exemple le plus marquant. 80 000 clients seront séduits et passerons commande dans la semaine de son lancement en 57 pour un véhicule qui leur serait livré dans les 24 mois suivants et qui restera souvent couché au sol dans la rue au dessus d’une énorme tache d’huile .

1.1 Le rêve de consommation

La seconde guerre marque un tournant dans les façons de vivre et dans les consommations. L’Amérique libératrice, moderne et riche a su faire naitre et vivre le rêve de consommation pour des ménages que 4 années de guerre et de sous consommation avaient frustrées. En quelques années de 1950 à 1980, les innovations vont révolutionner nos modes de vie.

1.1.1 Innovations collectives d’une génération centrée sur elle mêmeSécurité sociale et allocations familiales, l’emploi de la femme et le second salaire dans le ménage, le contrôle des naissances et le droit à l’avortement, les divorces et le concubinage, le développement de l’habitat vertical et des villes nouvelles pour loger les populations en provenance des campagnes ou de l’étranger, les infrastructures de transport et autoroutières, l’électricité et le gaz pour tous en service public unifié sous la marque EDF GDF, mais aussi l’inflation permettant d’acheter une maison –parfois de Castor- sans risque avec un crédit.

1.1.2 Innovations individuelles ensuite

Ces dernières se structurent en quatre temps forts :

années 50-60 : la décennie de besoin de Conformité

Les produits de consommations s’installent dans le foyer : voiture, aspirateur, machine à laver, cuisinière à gaz ou électrique, réfrigérateur, transistors, télévision, appareil photos, tourne disques, couvertures électriques, etc…

Les garanties des constructeurs sont éphémères sur des produits aux pannes fréquentes. Le consommateur est en recherche principale de fiabilité, de sécurité et d’une performance au regard de la promesse.

Les enquêtes marketing font leur apparition.

Les instituts qui apparaissent sont souvent piloter par des autodidactes issus du terrain et dotés d’une capacité d’écoute et de compréhension remarquable. Les notions de quali et quanti ne vont pas encore séparer le métier. Les études de satisfaction ayant quant à elles, principalement pour objectif de valider l’absence de panne.

Années 60-70 : la décennie de la Disponibilité et de l’Accessibilité à l’offre

La famille est écartelée entre d’une part, des parents traditionnels en costume cravate qui économisent avant de dépenser, qui gèrent toute consommation avec parcimonie, qui pensent que les guerres, aussi mauvaises soient elles, sont inéluctables, que De Gaulle, Tino rossi et les Compagnons de la chanson sont des repères immuables, sont partagés sur la fermeture des maisons closes et d’autre part, leurs enfants qui passent de Johnny aux Doors, remettent en cause les guerres d’Algérie ou du VietNam et érigent la paix, l’amour libre, les cheveux longs et Katmandou en valeurs fondamlentales tout en pensant que la pilule sera peut être bientôt en vente dans les monoprix !

Le petit commerce de centre ville n’offre plus assez de choix, n’a pas assez d’espace et affiche des tarifs élevés. Le consommateur se précipite dans les premiers hyper et supermarchés qui offrent un éventail plus large de produits, un choix plus profond, des tarifs plus attractifs, une occasion d’utiliser la nouvelle voiture et même d’y mettre de l’essence en se servant soit même.

Les magasins de produits de haut de gamme étoffent leurs offres : les marchands de télévision font de la Hifi et de la photo, les chaînes s’installent en centre ville : Boulanger en électroménager, Etam, Bata et André en vêtement et chaussures.

Le consommateur veut les produits à disposition immédiate et veut des étalements du règlement du prix. Les besoins de Disponibilité et d’Accessibilité sont en train de naitre.

Les études deviennent plus créatives, les méthodologies s’affinent pour donner naissance à des segmentations : satisfaction, marché, comportement, usage, attentes etc…

Années 70-80 : la décennie du marketing et de la Sollicitude.

Le bikini et le monokini se généralisent, le Disco chasse le flowerpower, le rubik’s cube, les télécommandes en tous genres facilitent la vie à la maison, la carte de crédit dématérialise l’argent, l’abolition de la peine de mort partage la France entre gauche et droite, le droit à l’avortement renforce le rôle de la femme dans la société , la télé que l’on peut enregistrer sur bétamax ou vhs a 5 chaines et une nouvelle est même payante.

On peut enregistrer les disques sur K7 ou sur bandes. Les calculs sont facilités par l’arrivée de la calculatrice individuelle. La GTI et le premier monospace font leur apparition en même temps que les radars. Les destinations lointaines se multiplient et le téléphone se banalise dans les foyers en même temps que disparaissent les opératrices de standard.

La recherche d’individualisme de la consommation se renforce avec l’apparition d’une concurrence étrangère.

Le monde est en marche, il courre même, quitte à boiter demain !

La fiabilité s’améliore, les marques se multiplient, les produits aussi et viennent s’exposer dans des linéaires de plus en plus longs, le merchandising fait sont apparition.

L’image est devenu l’élément majeur avec des publicités qui mettent au panier les réclames, avec la mise en avant des marques avant même les aptitudes des produits.

Le consommateur quitte son statut de client pour endosser celui de cible, que l’on segmente et pour lequel on positionne les offres autour d’un unique bénéfice produit.

L’offre s’adapte aux évolutions des besoins qu’elle suscite.

Le consommateur a l’impression d’être écouté et il saura se faire entendre sur les illusions qui l’amène à consommer des produits ou des marques éphémères.

Les démarches qualités sont en train de naître.

C’est l’ère de la sollicitude.

Au niveau des instituts d’études, la créativité bat son plein, les techniques les plus sophistiquées apparaissent tantôt du coté des quantitativistes avec l’apparition de l’Analyse de données multivariées rendue possible par les outils informatiques, les grosses enquêtes téléphoniques, tantôt du coté des qualitativistes .

Les années 80-90 : la décennie de la confiance

Les ordinateurs deviennent portables, les téléphones aussi, l’internet fait sont apparition et vient ériger un monde de taille planétaire de plus en plus virtuel dans lequel le consommateur cherche à retrouver la confiance mise à mal par l’effondrement de tous les repères construits par la génération d’après guerre devenue senior et dont l’espérance de vie à l’âge de la retraite est passée de quelques mois à plus de 15 ans.

La famille se décompose, devient monoparentale ou se recompose, le centre des villes rendait sur fond d’autobloquants et de magasins franchisés, les périphéries deviennent explosives et composée majoritairement d’une population multiraciale issue d’ une émigration qui atteint sa 3° génération. L’Europe se construit, au fil des crises successives économiques, politiques et sociales.

Les marques et les publicités sont aussi belles qu’elles sont éloignées de la réalité attendue par l’utilisateur.

Les marques doivent renouer avec le consommateur et se penchent sur leur ADN, le sens de leur histoire, les valeurs qu’elles portent.

On ne vend plus des yaourts mais de la nutrition ou de la santé.

On ne vend plus de l’électricité mais de la lumière.

On ne vend plus des cures mais du bien être.

On ne vend plus des machines à sous mais du lien social etc …

Pendant ce temps les instituts d’étude se préparent à un transfert d’une génération de dirigeants créatifs aux tarifs prohibitifs vers une génération de gestionnaires industrialisateurs des méthodes de calcul mis au point dans les décennies précédentes et fortement imprégnés des besoins auxquels ils devaient répondre en leur temps. Dans un prochain article, « Pourquoi nos indicateurs sont devenus fous ? « nous illustrerons pourquoi les calculs, au demeurant justes, d’aujourd’hui, reposent en fait sur des raisonnements faux .


Réponses

  1. bonjour

    qu’en retirez vous ?

  2. Merci beaucoup pour cette très bonne synthèse !


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